vendredi 6 novembre 2015

Alfred de Musset, « La nuit de décembre » (1835)

Eugène Lami, La Nuit de décembre
Ce couplet de « La nuit de décembre », cité par Otto Rank dans « Le double», est parmi des plus belles lignes de la poésie que je connais.
Partout où j'ai voulu dormir,
Partout où j'ai voulu mourir,
Partout où j'ai touché la terre,
Sur ma route est venu s'asseoir
Un malheureux vêtu de noir,
Qui me ressemblait comme un frère.
Ce double de « dormir » et « mourir » me rappelle deux autres poèmes que je aussi vraiment aime, l'un par Robert Frost, l'autre par Robert W. Service. Dans le fameux vers de Frost, le narrateur voudrait s'endormir dans le forêt enneigé et presque enchanté, mais :
[...] I have promises to keep,
And miles to go before I sleep,
And miles to go before I sleep.
« The Quitter » par Robert W. Service ressemble beaucoup « If » par Kipling, c'est un poème du courage et du ressource(?).
Just have one more try — it’s dead easy to die,
It’s the keeping-on-living that’s hard.
Le double dans « La nuit de décembre » aide le poète ne pas s'endormir, ne pas mourir, comme le dit le poète :
En te voyant, j'aime la Providence.
Et aussi le double :
Le ciel m'a confié ton coeur.
Quand tu seras dans la douleur,
Viens à moi sans inquiétude. 
Mais, comme toujours dans les histoires de doubles, il a de prix. Le poème se finit avec une assertion douloureuse :
Ami, je suis la Solitude.

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