dimanche 12 juillet 2015

Racine (1639 - 1699), Phèdre (1677)

Un des livres préférés de ma bibliothèque est une Anthologie de la poésie française, que mon père m'a apporté de Paris il y a plusieurs années. Cette anthologie est parue en 1941, en pleine deuxième guerre mondiale. Le préfacier du livre, romancier et critique littéraire Marcel Arland, est un peu apologétique du fait que ce livre paraît pendant la guerre : « c'était Ronsard et Vigny, Aubigné et La Fontaine, qui se trouvaient menacés. [...] Voici ceux pour qui nous combattons et qui combattent avec nous. C'est le meilleur de notre pays et de nous-mêmes. »
En parlant de Racine, Arland dit : « Le Racine de la Pléiade fut le premier livre que j'emportai pour la guerre. [...] C'était le meilleur de ce qu'il fallait sauver. C'était le meilleur de la France. »
Alors, le meilleur du meilleur de la France. J'aime bien cette formulation et ce livre.
Phèdre, ACTE premier, Scène première[...]
THÉRAMÈNE
Eh ! depuis quand, seigneur, craignez-vous la présence
De ces paisibles lieux si chers à votre enfance,
Et dont je vous ai vu préférer le séjour
Au tumulte pompeux d’Athène et de la cour ?
Quel péril, ou plutôt quel chagrin vous en chasse ? 
HIPPOLYTE
Cet heureux temps n’est plus.
Tout a changé de face,
Depuis que sur ces bords les dieux ont envoyé
La fille de Minos et de Pasiphaé. 
THÉRAMÈNE
J’entends : de vos douleurs la cause m’est connue.
Phèdre ici vous chagrine, et blesse votre vue.
Dangereuse marâtre, à peine elle vous vit,
Que votre exil d’abord signala son crédit.
Mais sa haine, sur vous autrefois attachée,
Ou s’est évanouie, ou s’est bien relâchée.
Et d’ailleurs quels périls vous peut faire courir
Une femme mourante, et qui cherche à mourir ?
Phèdre, atteinte d’un mal qu’elle s’obstine à taire,
Lasse enfin d’elle-même et du jour qui l’éclaire,
Peut-elle contre vous former quelques desseins ? 
HIPPOLYTE
Sa vaine inimitié n’est pas ce que je crains. [...] 

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